19 août 2007

"Une gourmandise" et "L'Elegance du hérisson" de Muriel BARBERY



Premier roman de l'auteur(e) de "L'élégance du hérisson".
Critique gastronomique mondialement connu, vénéré et craint, il meurt : il sait qu'il lui reste tout au plus 48 heures à vivre. Récit à plusieurs voix, dont le fil conducteur est la recherche d'une saveur autrefois rencontrée et aujourd'hui perdue, bilan d'une vie égocentrique - si ce n'est égoïste -, autosuffisante, le livre alterne points de vue et réflexions de différents protagonistes (épouse, enfants, concierge, clochard, chat, ..., bref, certains qui l'ont approché) et souvenirs qui affluent, affleurent et voguent sans parvenir à satisfaire l'homme prétentieux et exigeant, maintenant couché dans son lit, et à qui personne n'a résisté.
Cela nous vaut de belles pages de souvenirs d'enfance et d'adolescence, mais surtout de magnifiques pages de souvenirs et découvertes culinaires , de descriptions de mets et de saveurs, dans une langue agréable, suave, parfaitement maîtrisée.
Mais, étrangement, il semble manquer un petit quelque chose :
de la chaleur, de l'humanité ?? Pourtant, l'humanité de l'auteur(e) est là.
Une construction un peu artificielle ? Pourtant, l'auteur(e) se l'est approprié, peut-être un peu imparfaitement (?) ...
Certes, c'est un 1er roman (pour moi, ce n'est d'ailleurs pas un roman), mais d'autres n'ont écrit qu'une seule oeuvre, et laquelle!
Je suis curieuse de lire "L'élégance du hérisson", et connaître vos avis, sur ce petit quelque chose. qui semble faire comme un manque.
Malgré tout, je ne peux que saluer la performance (de là, peut-être une certaine gêne : il me semble s'agir d'une performance ...), propre et efficace, mais qui n'empêche cependant pas des à-coups dans un moteur, certes bien huilé, mais ...

Idem, idem, idem.
Nous retrouvons la concierge entr'aperçue dans le roman 1, et d'autres personnages également cités : cette fois, il s'agit bien d'un livre à 2 voix (à 2 voies) entre Renée & Paloma ...
Même schéma, mêmes points forts, mêmes faiblesses : je ne suis décidément pas fanatique du genre, ou du moins ne le suis plus (sans doute est-ce dû à mon grand âge ...) "Etrange roman philosophique et burlesque" + "étrange succès universel pour un roman philosophique qui convoque aussi bien Eminem que Purcell, le cinéma d'Ozu que Blade Runner et qui flirte parfois, sans jamais se départir de sa légèreté, avec les ouvrages que l'on trouve au rayon Développement personnel des librairies" (Express du 05/04/07) : je trouve que c'est assez bien vu. A la fois tentant - ne serait-ce que le titre! -, séduisant et facile - chapitres courts, écriture légère et fluide : à conseiller aux curieux fâchés avec la lecture -, mais un peu vain et impersonnel : juste dans l'air du temps (on aime ce qui est zen, japonisant, les philosophes, la quête de soi ... et le développement personnel !). Je comprends que les libraires aient pu le conseiller, et je pense que les profs de lycée vont faire de même : je ne le déconseille pas non plus, même peux le conseiller à certain(e)s, mais je crois que c'est beaucoup de bruit pour ... disons, un phénomène exagéré et exacerbé, malheureusement répétitif, qui me laisse plutôt craindre pour le devenir de la littérature ... et de ceux qui l'entourent, si l'on continue de trouver élégante cette manière hérissante d'écrire, et de caresser le lecteur pour qu'il ne se mette pas en boule ! Bref, un petit livre qui se lit vite, ... et s'oublie tout aussi vite ...
[Désolée pour Muriel Barbery, qui semble sincère et très sympathique, et les aficionados ...euh ... eux aussi très sympatiques , pour cette franchise brutale !]

Laurence

09 août 2007

"Comment reconnaître vos amis des grands singes" de Will Cuppy


Un petit ouvrage sans prétention aucune, si ce n'est celle de nous amuser, par l'un des journalistes du "New Yorker", et "chef de file de la critique littéraire américaine dans le domaine du roman policier" (P.G. Wodehouse) : hé bien, c'est réussi, car très drôle, même hilarant, et, en tous les cas, parfaitement revigorant! Je cite l'auteur (denière ligne de la préface) : "Pour conclure, j'aimerais dire que, si mes tentatives pour amuser la galerie ont été, même de façon imparfaite, couronnées de succès, si je suis parvenu à faire passer agréablement une heure d'oisiveté, si j'ai su saisir dans ces pages de quoi édifier ou combler l'esprit de mes lecteurs, bref, si j'ai écrit le meilleur livre de l'année, j'en serai vraiment comme deux ronds de flan." Bonne rigolade!
Laurence

08 août 2007

"Trois jours chez ma mère" de François WEYERGANS

En voilà encore un qui se prend sûrement pour un génie de l’écriture…
Quand je pense que les jurés du Goncourt en 2005 ont hésité entre un Houellebecq et Weyergans et que je lis le contenu de « Trois jours chez ma mère »…. Je suis affligée…
"Trois jours chez ma mère" aurait pu s’appeler « Eloge d’un Ego en panne d’inspiration » ou encore finalement « Eloge du Rien »… Recueil de pensées digne d’un journal d’une adolescente. Recherche de faits divers futiles pour meubler l’angoisse du livre annoncé et le manque d’inspiration. S’inventer un personnage digne d’intérêt sans heurter sa famille pour éviter les règlements de compte post-publication… Ses ennuis avec son banquier nous ennuient profondément, tout comme les allusions au dictionnaire qu’on peut consulter nous-mêmes. Sa flagornerie est à son top supportable quand - tel un Alain Delon - « il » parle de lui à la troisième personne.
Oui c’est vrai, les jurés du Goncourt 2005 auraient pu s’y tromper entre Weyergans et Houellebecq ; il s’agit bien de clones…. Clones fades en recherche de remplissage de caractères d’imprimerie sur des pages blanches qui auraient mieux fait de le rester.
Pourtant après avoir franchi la page 143, j’ai cru qu’un jour nouveau naissait, j’ai cru –originalité sublime- que l’auteur nous avait fait une farce. J’ai cru qu’on allait avoir enfin de l’émotion, une « raison d’être » au titre. Si je suis honnête avec nos lecteurs, la seconde partie est quand même plus enlevée, bien qu’on reste déçu de ce manque de profondeur persistant.
Mais après tout, c’est bien le risque qu’on prend à chaque fois qu’on ouvre un livre, c’est de ne pas y trouver le sel qu’on y cherche.
Bon c’est pas le tout, mais moi je vous laisse, je commence mon premier Goncourt.
Mata Hari

07 août 2007

America, America

Pourquoi suis-je autant fascinée par la littérature des Etats-Unis ? Peut-être à cause de la diversité, si passionnante, de ses mythes contemporains que les écrivains ne cessent d'interroger, comme dans ces trois romans que je viens de finir et qui incarnent chacun un modèle de roman américain :

- juif new yorkais : Sheila Levine est morte et vit à New York de Gail PARENT. Paru dans les années 70, ancêtre de Sex and the city, ce roman culte et désopilant narre les efforts désespérés de l'héroïne, tiraillée entre la tradition juive (sa mère) qui lui a inculqué "hors de mariage point de salut" (comprenez, pour une femme) et l'envie de prendre sa vie en main et de s'assumer. On pense à Woody Allen bien sûr, pour l'évocation des quartiers de New York et de la mentalité juive, ainsi que pour les bons mots et l'autodérision omniprésents.
Le plus drôle...



- jeunesse perdue de l'Amérique profonde : Rêves de garçons de Laura KASISCHKE. Dans un camp d'été de cheerleaders, la fugue de trois jeunes filles les entraîne vers un drame inattendu, entretenu savamment par l'auteur dans un récit à la construction étonnante. On pense à Joyce Carol Oates pour l'univers un peu malsain et l'écriture, à Virgin suicides et à nombre de films traitant de l'hypocrisie d'une société à la jeunesse apparemment saine et sportive, qui cache un mal de vivre et le cynisme des idéaux envolés trop tôt.
Le plus "flippant"...



- Amérique profonde rurale : Les gens de Holt County de Kent HARUF. Chronique d'une petite ville du Colorado, tous ses personnages forment une mosaïque d'abord éclatée, et qui finit par se composer sous nos yeux : la famille de marginaux paumés, et l'assistante sociale qui les suit, les deux frères éleveurs de bétail, vieux garçons, qui ont recueilli une adolescente et son bébé en rupture, le petit garçon élevé par son grand-père et son amie dont la maman divorcée sombre dans la dépression. Un roman choral magistral, attachant. On pense à Cormac Mc Carthy, au Secret de Brokeback Mountain pour l'évocation de la rudesse de la vie rurale et la pudeur des sentiments.
Le plus émouvant... et incontestablement celui que j'ai préféré !
Isa