27 février 2012

Big Bang Theory (série)

Des Friends à la sauce geek et californienne, ça intrigue. Et ça marche ! Cette bande de chercheurs à l'université, fans de jeux vidéo, comics et super héros sont bien typés et attachants, exaspérants à souhait.
En tête, Sheldon Cooper, sorte de D2R2 pour la gestuelle : ce surdoué de la physique quantique (enfin je crois), est un des personnages les plus drôles et les plus originaux qu'un genre aussi calibré que la sitcom de coloc' ait créé. Totalement asexué, bourré de TOCS (et de tics), nul en relations humaines (ça ne se traduit pas en équation), c'est un grand enfant totalement imbu de lui-même et totalement désopilant. Son coloc Leonard, le moins geek de tous, essaie de vivre une relation avec Penny la voisine de palier, une serveuse-blonde-délurée-au-grand-coeur. Gravitent autour d'eux Raj, l'indien inhibé (il ne peut parler aux filles que sous l'emprise de la boisson) et Howard, le "raté" de la bande (il est ingénieur...), qui vit avec sa mère juive abusive (on n'entend que sa voix croassante sans jamais la voir, jolie trouvaille).
Des dialogues ultra-référencés culture geek (mais ça va on suit quand même), des monologues scientifiques dont on devine qu'ils ne sont pas totalement farfelus (la théorie des cordes, tout ça...), sur le papier cela peut sembler excluant, mais non, c'est vraiment très drôle et très efficace. Mais surtout ne regardez pas Big Bang Theory en français, c'est un vrai massacre.
IsaH

Ombres et Lumières d’Outre Temps de Luc VALERO

Qu’est ce qui peut pousser quelqu’un à s’intéresser à ce qui paraît être un simple recueil de poésies, écrit de surcroît par un inconnu ? Rien, tant on en croise souvent qui ne présentent que peu d’intérêt. Pourtant un heureux hasard m’a amenée à le faire avec Ombres et Lumières d’Outre Temps de Luc Valéro repéré sur un blog, et ce fut une très belle rencontre.

Sous ses airs de recueil anodin, l’ouvrage m’a réservé une belle surprise… Il ne s’agit pas à proprement parler d’un recueil de poèmes. C’est un livre différent, inclassable. Une série de dix textes, courts et de formes variées, qui constituent un tout dont la portée se révèle avec pudeur, peu à peu, au fil des pages. Exprimer les émotions n’est pas chose aisée. On peut vite sombrer dans le dégoulinant ou le voyeurisme. Et bien ici rien de tout cela. Passé la surprise de la première page, je dois reconnaitre que ce livre m’a vraiment transportée et émue, « interpellée » (dixit l’auteur) de manière très habile, et j’ai beaucoup aimé. Le style est fluide et révèle avec beaucoup de délicatesse une sensibilité un peu désuète qui fait trop défaut dans le monde qui nous entoure. Ce livre ne m’a pas laissée indifférente, il mérite vraiment qu’on s’y arrête, je vous le recommande.

Nathalie

Charlotte a lu...

Dire son nom de Francisco Goldman
Comment faire le deuil de sa femme, quand celle-ci disparaît à trente ans, comme ça, subitement, sans prévenir… ? C’est son histoire que nous raconte l’auteur, ce deuil impossible, cette sensation de vide qui peut parfois frôler la folie.
Si le pitch est douloureux, le livre est léger, parfois trop d’ailleurs.
On s'ennuie un peu au début, désolé de ne pas s'attacher à cette jeune femme dont on connaît l'issue fatale, et puis finalement on se laisse happer pour l’histoire, par la vie d’Aura avant sa mort, ses envies, sa fantaisie, ses doutes, son insatiable quête de notoriété, ses rêves.
L’auteur aurait pu faire un livre moralisateur sur l’idée de vivre sa vie pleinement, de ne pas faire de compromis car tout peut s’arrêter demain, mais il n’en est rien.
Il décrit juste ce qu’il vit, se rappelle des souvenirs, nous déroule le fil de la vie d’Aura.
On reste cependant parfois un peu froid face à tout cela, comme si lui était également un peu étranger à ce qu’il vit.

Tangente vers l’est de Maylis de Kerangal
Roman très court sur la fuite.

Décor : le transsibérien.
Personnages : Hélène, française fuyant son amant russe et Aliocha, jeune soldat réquisitionné ne cherchant qu’à déserter.
Ou la rencontre de deux personnages que tout oppose et pourtant... Portrait de deux fuites avec une conclusion claire et réaliste: quelque soit la chose, le lieu, la personne que l’on fuit, les ressentis et les émotions sont proches… on a tous le même visage dans ce cas là...
L’écriture de Maylis de Kerangal est travaillée, fouillée, structurée. On se laisse embarquer par ce récit très court, le décor défile sous nos yeux.
Court mais intense ! Ce livre vient de recevoir le prix Landerneau.

Charlotte

13 février 2012

Rouge argile de Virginie OLLAGNIER

Parfois il est difficile de parler des choses qui vous touchent profondément, qui vous émeuvent plus que d’autres, qui sont ressenties physiquement et pas seulement effleurées… Et pourtant, il faut que j’essaie de vous parler de ce livre… Un livre peut vraiment avoir cet effet? Oui!
J’ai vécu ce livre, il m’a réchauffé, m’a fait voyager, m’a poursuivi toute la journée, n’attendant qu’une chose le retrouver le soir pour le dévorer, qui m’a fait me lever un peu plus tôt pour le terminer…
Ce livre, c’est Rouge argile de Virginie Ollagnier
C’est un livre solaire, lumineux, décomplexant, qui vous embarque dans un Maroc chaud où les blessures de l’Histoire sont encore présentes mais où l’on essaie de vivre, d’oublier.
C’est un roman assez court mais qui véhicule tant d’émotions, de sentiments nobles, sur le rôle à tenir dans la vie, sur les non dits, les pudeurs, le pardon, la force et le courage.
Rosa vous embarque dans ce monde avec la sanguine Shérifa, la voluptueuse Monde, le disparu si présent Egon... Pas de longues descriptions et pourtant le style de V. Ollagnier vous emporte dans cette vieille maison entourée d’une orangeraie où le travail de la terre libère, apaise les maux.
Un réel coup de cœur… Un livre unique !
Je suis émue rien que d’en parler tant ce livre a été un bonheur pour moi. Je n’aime pas relire les livres et pourtant je pense que celui là, je le rouvrirai pour me faire du bien, pour me prouver que dans la vie rien n’est tranché, que ce que l’on croyait acquis hier ne l’est peut être pas, qui vous démontre que rien ne peut être arrêté, que vos grandes idées sur le couple et sur la vie ne sont que des préjugés et que la vie vous démontre sa complexité et sa diversité à chaque instant...
Charlotte

Le rabaissement de Philip ROTH


Un livre court et incisif (mais pas exempt de longueurs), pas aussi génial que la critique le dit. On retrouve les thèmes de prédilection de Philip Roth, avec cet acteur de 60 ans, riche d'une carrière hors du commun sur Broadway et ailleurs, et qui perd le goût de jouer. Il devient mauvais sur scène, sombre dans la dépression. Il va se régénérer au contact d'une jeune femme de 40 ans, lesbienne, qu'il va façonner, et qui va se laisser façonner. Ils iront trop loin dans leurs jeux sexuels et tout finira mal... Bon, hormis une scène magistrale où la jeune femme raconte au héros la réaction de ses parents lorsqu'il apprennent leur liaison, et on comprend alors toute sa cruauté, ce livre ne me laissera pas un souvenir impérissable.
IsaH

12 février 2012

Le cas Sneijder de Jean-Paul DUBOIS

On peut le dire, Paul, le héros de ce livre est en chute libre : au sens propre du terme au début du livre comme au sens figuré à la fin des 218 pages.
A la suite d’un accident dramatique d’ascenseur qui l’a plongé dans le coma, Paul, endeuillé, se refuse à reprendre une vie que déjà, il poursuivait à contrecoeur. Ses repères troublés et quelques crises d’angoisse le poussent à trouver un nouveau travail à l’extérieur, à l’air libre sur la terre ferme, loin de cette verticalité que nous impose le monde moderne. Il devient alors Dog Walker, promeneur de chiens et a soudain l’impression que les canins le comprennent mieux que sa propre famille. Cela nous vaut quelques passages savoureux et très drôles.
Il continue néanmoins à s’interroger sur le drame qu’il a vécu, en compulsant la nuit, des documents sur le fonctionnement des ascenseurs réputés pourtant comme le moyen de transport le plus fiable du monde. Et il apprend beaucoup sur l’espace personnel, sur la vitesse et même sur les boutons qui ne servent qu’à rassurer…..Comprendre enfin pour effacer les images qui le hantent, de ce moment qui lui a enlevé sa fille.
Cette nouvelle attitude, bien sûr, ne plaît pas du tout à sa femme et à ses deux clones de fils qui se chargeront de lui faire comprendre à leur manière et « pour son bien » qu’il est temps de changer.
Autour de lui gravite une ronde de personnages fantasques qui n’ont rien à lui envier en matière d’originalité, un accro des nombres palindromiques, un autre des jardins japonais. Comme toujours chez Jean-Paul Dubois on colle au plus près des émotions du héros grâce à une écriture inventive déjà admirée dans ces précédents romans.
Ce n’est pas sans tristesse qu’on l’abandonne à la fin du livre « seul et la face tournée vers le mur » pour ne plus voir ceux qui ne l’ont jamais compris.

En refermant cet ouvrage il n’est pas dit que votre vision des ascenseurs ne sera pas légèrement modifiée. Pour ma part, c’est loin de m’avoir réconcilié avec eux !!
Ann

Et rester vivant de Jean-Philippe BLONDEL

Cela fait un moment que j’ai lu ce livre et j’attendais car je ne savais pas quoi en dire…
Je vais vraiment finir par croire que je suis un peu décalée car tous les livres à grand succès n’ont pas sur moi un effet fou (il y a des exceptions certes !!)…
J’ai lu d’une traite ce roman, court et efficace sans doute mais je n’ai rien ressenti…
Pourtant, le postulat est dramatique : la perte pour l’auteur de sa mère et de son frère dans un accident de voiture puis quelques années plus tard de son père. Complètement déconnecté de la vie, il part aux Etats-Unis dans un road movie avec son meilleur ami et leur petite amie commune (un peu plus compliqué mais je résume !)… Aucune émotion partagée, aucun moment de compassion ou au contraire d’envie de vivre, rien… Je n’entends que des bonnes critiques sur ce livre mais pour ma part, je suis restée hermétique!
Charlotte




The Descendants de Alexander PAYNE

George Clooney n'hésite jamais à incarner des personnages carrément grotesques (voir les films des frères Coen), mais il sait aussi faire dans le "vaguement ridicule", comme lorsqu'il incarne Matt, le héros de The Descendants. Avec ses chemises hawaïennes, ses pantalons taille haute ou ses tongues, il ne paie pas de mine. Matt est dépassé par ses deux filles adolescentes, qu'il ne connaît pas bien, et dont il est obligé de s'occuper depuis que sa femme est dans le coma suite à un accident de hors bord. Dans la scène la plus ouvertement comique du film, on le voit courir comme un dératé sur une route en pente, avec une technique très particulière qui tient du canard. Et pourtant, le film vient de basculer dans le tragique : Matt apprend de sa fille que sa femme le trompait au moment de l'accident. Gros plan sur le visage bouleversé de Clooney, on est dans l'empathie totale avec le personnage. Et le plan d'après il part en courant (voir description de la course ci-dessus) et on est morts de rire... Voilà tout l'intérêt de ce film. Sur le papier, mélo à souhait. Dans les faits, des ruptures subtiles ou brutales de ton qui ne nous laissent jamais dans le même registre. Rajoutez à cela des images splendides d'Hawaï et une réflexion sur la transmission (Matt et ses cousins sont les descendants des fondateurs de l'île et doivent se résoudre à vendre les dernières terres vierges qui leur restent) ainsi qu'une distribution largement à la hauteur du grand George : les deux filles de Matt sont plus vraies que nature, mention spéciale au copain abruti et au grand-père agressif mais dévasté (ou l'inverse).

On passe un bon moment devant un film sans prétention, sans temps mort, un peu tire-larmes sur la fin, mais dont le dernier plan, volontairement étiré, nous redonne le sourire : la vie reprend ses droits, la famille se ressoude, témoin ce bol de fraises et cette couverture partagés sans un mot, tous ensemble sur un canapé, devant la télévision...
IsaH

Les raisons de mon crime de Nathalie KUPERMAN

Je ne sais pas si je me tourne vers ses livres en ce moment ou si c’est un courant en vogue mais les romans sur l’écrivain lui-même, sur la difficulté d’écrire, sur la volonté d’écrire, sur le mal que cela peut engendrer autour de soi fleurissent et me tombent entre les mains.

Je pensais m’éloigner complètement de cet univers avec ce roman, dans lequel on se retrouve confrontée à Marianne, la narratrice, qui essaie de renouer le contact avec une cousine perdue de vue, Martine, sans emploi, alcoolique, vivant dans 15 m2, dont elle veut raconter l’histoire et qui raconte que sa mère est une tueuse… Les personnages sont violents, l’écriture est ciselée, on est dans la misère, la décadence, la vie sans lumière. De ce point de vue là, c’est une réussite mais je me suis sentie mal à l’aise, gênée, pas à ma place. J’ai manqué d’air, encore une fois, un peu comme Pièce rapportée. Sans doute était ce l’effet recherché par l’auteur mais autant Le Système Victoria qui m’a parfois dérangée, bouleversée, brûlé les doigts restera un grand souvenir de lecture ; autant de celui est trop, trop brut, trop violent.
Charlotte


Monsieur Jules de Diane BROECKHOVEN

Il y a des livres qui trainent comme ça, sur une table de libraire, qui font leur petite vie dans leur coin, sans que tous les médias en parlent… et c’est un peu, par hasard, que je suis tombée sur ce livre : Une journée avec Monsieur Jules de Diane Broeckhoven, paru en 2001, traduit dans plein de pays et une réédition est intervenue en 2011…
C’est un court roman, tout doux, d’une tendresse infinie, d’une mélancolie rare…
Alice et Jules ont un rituel : il se lève le premier, fait le café pendant qu’Alice paresse pendant une demi heure dans son lit. Comme chaque matin, elle se lève, attirée par l’odeur du café fraichement passé. Elle suit ses petites habitudes, va s’asseoir à côté de Jules dans le canapé, le regarde et comprend… Jules est mort. Elle va pourtant décider de passer une dernière journée avec lui, sans prévenir famille et pompes funèbres, pour qu’on lui laisse son Jules encore un peu. Elle partagera cette journée avec David, le petit voisin autiste qui vient tous les jours faire une partie d’échecs avec Jules.
Ce roman n’est absolument pas morbide, il est au contraire assez apaisant. Elle va lui dire tout ce qu’elle a tu pendant si longtemps, se reposer une dernière fois près de lui. Le roman est très court, se lit en une traite mais les personnages sont attachants, immédiatement, sans longue description, on s’imagine parfaitement le décor, la scène.
Un roman tout doux sur la vie partagée, sur l’amour et la tendresse, sur le quotidien, sur les habitudes, sur la vie tout simplement.
Charlotte

04 février 2012

Désolations de David VANN

L’Alaska, de nos jours. Irene et Gary, un couple d'enseignants fraîchement en retraite. Après trente ans de vie commune, Gary veut réaliser à tout prix son rêve de construire une cabane sur une ile, Caribou Island (titre original du roman), une île déserte. Il entraîne Irène, malgré-elle, dans cette folle aventure, sans préparation. La nature est hostile, Gary veut terminer la cabane avant le plein hiver, mais la rudesse de la météto les plonge dans des conditions apocalyptiques. Dès le début, Irène est torturée par des migraines inexplicables. Inexplicables médicalement, mais pas psychologiquement. Car le corps parle, le couple est sur le point de se séparer après 20 ans de leurre. Chacun d'entre eux pense qu'il aurait mérité un meilleur conjoint, la cabane et les aléas de sa construction deviennent le symbole de leur échec.
En parallèle, nous suivons également le quotidien de leurs enfants Mark et Rhoda. Cette dernière, vétérinaire, est une jeune fille qui rêve de se marier un jour avec Jim, un dentiste qui lui offre des conditions de vie matérielles confortables mais lui porte peu d’attention et finit par la tromper avec une créature de passage, Monique. Mark, le fils, est plus en retrait de la famille. Il est pêcheur, intégré dans la société locale, vit avec Karen, une serveuse que ses parents méprisent. Le climat familial est pesant. Plusieurs couples, des relations compliquées, et un drame final... 
Ce livre m'a donné froid et mal à la tête, littéralement. La force de l’écriture est telle qu'elle transmet les sensations extrêmes comme rarement. Loin des canons idéalistes du "nature writing" américain, David Vann, outre l'illusion conjugale, dénonce également le leurre du retour à la nature. Celle-ci est hostile, et les vrais habitants de l’Alaska cherchent à la contourner ou à l’exploiter (par la pêche comme Mark) mais ne la magnifie pas, comme Gary, un intellectuel qui a entraîné sa famille dans un pays qui ne leur convient pas. De l'hostilité de la nature à l'hostilité du couple, Désolations est aussi un livre sur l'irruption de la lucidité (Irène, Gary, et dans une moindre mesure Rhoda), mais qui ne sert à rien car elle arrive trop tard. En cela, le roman est construit comme une tragédie grecque, l'enchaînement des faits est inéluctable à partir du moment où les protagonistes sont prisonniers de leurs erreurs et dominés par leur destin. La répétition du drame vécu par Irène, enfant, qu'elle ne peut s'empêcher de reproduire, est poignante...
IsaH