30 mars 2008

"Mère disparue" de Joyce Carol OATES


Gwen Eaton est une mère à l'image de toutes les mères: irritante parfois, attachante toujours, débordante cependant, altruiste mais tellement irremplaçable. Ses 2 filles seront littéralement « déchirées » par sa disparition brutale et chacune vivra ce « saignement intérieur » à sa façon. Nikki, la plus jeune, moderne et libérée, nous raconte cette année qui suivit le drame. Sa révolte mais aussi sa quête d'une meilleure connaissance de « celle qui va tant lui manquer ». Ses rapports avec sa soeur plus âgée et plus rangée, avec les hommes, avec la maison de sa mère et le calendrier d'habitudes de celle-ci. Faut-il tout rejeter ou au contraire comprendre (enfin!) cette femme qui l'a tant aimée?
Joyce Carol Oates revisite un thème récurrent chez les écrivains, les rapports mère-fille avec une tendresse éclatante et un regard neuf. Elle met son talent littéraire au service d'une relation qui n'a pas fini de nous dévoiler ses charmes et ses mystères. Elle sait trouver les mots que l'on ne peut plus dire.

Ann

23 mars 2008

"Il y a longtemps que je t'aime" de Philippe CLAUDEL


Que penser du premier film de Philippe Claudel ? J'en suis sortie assez perplexe.

- C'est long mais je ne me suis pas ennuyée (de temps en temps je m'occupais à chercher les endroits de Nancy où les scènes étaient tournées).


- Le face à face entre les deux soeurs fonctionne, K Scott Thomas (Juliette) est géniale, et Elsa Zylberstein (Léa), pour une fois, pas si mal.


Mais la fin est décevante, je n'osais me le formuler, mais en lisant certaines critiques, j'ai compris que c'était cela qui m'avait finalement vraiment gênée. On retombe dans l'"émotionnellement correct". Eh non, Juliette ne pouvait pas être cette criminelle intrigante et attachante en recherche de cette rédemption qu'on était tous prêts à lui accorder, tant que ses motivations à commettre le pire meurtre qu'on puisse imaginer nous était inconnues.


A la marge, quelques motifs d'agacement, pas bien graves mais quand même, dans la description de l'entourage de Léa, prof de littérature à Nancy 2 : les petites filles adoptées (parce-que-Léa-ne-pouvait-pas-sentir-un-enfant-dans-son-ventre, on se demande pourquoi...) ; le grand-père muet suite à une AVC, mais si souriant ; les amis, intellectuels mais qui aiment le foot (vive l'ASNL), bof bof bof.


Deux personnages secondaires surnagent : le collègue de Léa, Michel, double assumé de Claudel lui-même, qui finit par faire revenir Juliette à la vie, et le lieutenant de police, officier de probation dépressif, qui rêve de l'Orénoque.


En bref, Juliette est un personnage digne du souffle et des ambiguités des "Ames grises", placée dans un mélo bien pensant plus proche de l'esprit de "La petite fille de Monsieur Linh". Et pour ce qui est de la thématique de l'enfermement et de la prison, (re)lisez plutôt "Le Bruit des trousseaux".


Je suis un peu sévère, mais j'ai beaucoup d'admiration pour Philippe Claudel écrivain, alors j'attendais beaucoup du cinéaste.


Isa


20 mars 2008

La Môme et le Ch'ti

J'ai vu coup sur coup deux grands succès populaires, dont je me méfiais comme la peste a priori. Non pas parce qu'ils ont du succès, mais parce que les biopics m'ennuient souvent et que les comédies françaises récentes sont à la ramasse (en plus j'aime pas Dany Boon...).


Au bout de vingt minutes, je regardais ma montre au lieu de l'écran : "Bienvenue chez les Ch'tis " est un navet de taille. Dès que Kad Merad arrive dans le Nord, l'affaire est pliée : tout devient lourd, long, le scénario tient sur une ligne, et encore pas bien droit, chacun ânnone avec plus ou moins d'aisance (pauvre Line Renaud, on souffre pour elle) ce salmigondis ch'ti comme si c'était une langue étrangère. En 2008, oser proposer un film reposant sur un seul effet comique, de plus usé jusqu'à la corde, l'accent et les malentendus qu'il génère... Ca fait peur ! Ceux qui ont vu uniquement la bande annonce ont vu le meilleur, concentré au début : Galabru, le rideau de pluie qui s'abat instantanément sur la voiture lorsqu'elle franchit le panneau Nord pas de Calais... C'est à peu près tout. Quand je pense qu'il y a de gens qui sont déjà allés le voir trois fois au cinéma !!


Je pensais (nous pensions) tenir vingt minutes, on s'était dit, bon on va quand même regarder un peu, voir si la Cotillard vaut tout ce remue-ménage, et comme ça on pourra dire du mal du film en connaissance de cause (voir ci-dessus !). Deux heures et cinq minutes plus tard, on était toujours devant la télé, pour ma part les larmes aux yeux, mais pas seulement émus par cette courte vie si tragique et si passionnée. Médusés par l'ingéniosité du scénario, par l'expressionnisme de la mise en scène, tellement en phase avec le personnage. Et bien sûr par l'incarnation de Piaf par cette jeune actrice assez quelconque. Marion Cotillard est époustouflante mais je trouve qu'on n'a pas assez parlé du travail de Dahan, du point de vue qu'il a adopté, des choix qu'il a faits dans cette vie incroyable : l'accent mis sur l'enfance et les débuts, les flash backs qui s'imbriquent si harmonieusement et qui permettent de supporter l'insoutenable déchéance physique et la scène d'agonie. Et ces scènes incroyables, lorsqu'à 10 ans elle chante La Marseillaise dans la rue, ou plus tard lorsqu'elle se réveille aux côtés de Cerdan, ... mais je n'en dirai pas plus, ceux qui l'ont vu comprendront.
Alors que faire de ses a prioris sur tel ou tel film ? J'aurais pu passer à côté de "La Môme", quel dommage... Et tant pis pour les Ch'tis, voir un mauvais film n'a jamais tué personne... Ca aurait pu me faire rire, ça valait le coup d'essayer...
Isabelle

16 mars 2008

"Margherita Dolcevita" de Stefano BENNI


Voilà un joli petit livre, entre conte et fable, qui met en scène Margherita, jeune adolescente italienne un peu boulotte mais très fûtée, et sa famille plutôt bohème : son papa, réparateur de vélos, sa mère, rêveuse et fan de la série télé "Eternal Love", ses deux frères, l'un plutôt lourdaud et l'autre petit génie des mathématiques. Lorsque la famille Del Bene s'installe sur le terrain voisin, après avoir fait construire en une journée un cube noir et brillant, truffé de technologie, en guise de maison, elle se méfie. Ces gens-là en savent beaucoup trop sur la famille Dolcevita, sur qui ils vont vite prendre un ascendant fâcheux : la mère de Margherita achète un gigantesque écran plasma et plonge carrément au coeur d'Eternal love, son père ne supporte plus sa calvitie, son frère aîné tombe raide dingue de la fille Del Bene, lolita de pacotille, et son jeune frère s'abîme dans les derniers jeux vidéos importés par Mr Del Bene. Celui-ci a des activités bien mystérieuses, et veut "nettoyer" le quartier des gitans, des marginaux et des insectes.... Margerita va tenter coûte que coûte de comprendre ce qui se trame, avec l'aide de la Petite Fille de poussière et du "vampire blond", le bel Angelo Del Bene, interné régulièrement par ses parents auxquels il s'oppose.

Un conte, avec sa part de mystère, propre à l'enfance (qui est la Petite Fille de poussière qui protège Margherita ?), une fable écologique et politique (non à une société aseptisée d'où aucune tête ne dépasse), un récit très drôle et intrigant, qui fait la part belle aux monologues intérieurs de Margherita, bref une trouvaille, je ne connaissais pas cet auteur italien, tout à fait étonnant, et cela me donne envie d'en lire d'autres. A conseiller aussi aux ados.
Isabelle