17 février 2008

"Ce qui a dévoré nos coeurs" de Louise ERDRICH


Fayes Travers - la narratrice - , expert en biens mobiliers, vit avec sa mère dans le New-Hampshire. Discrète, et honnête (ceci a son importance), vie au ralenti, sans grand relief, entrecoupée de visites au cimetière et de visites à son voisin, amant occasionnel. Lors d'une succession dont elle réalise l'estimation, elle découvre un tambour ojibva, qu'elle s'approprie... Geste inconsidéré, et considérable . Si là se trouve le prétexte du roman, le fil conducteur en est l'histoire même du tambour - d'ailleurs, le titre original est "The painted drum" - , la trame tissée de façon complexe : un écheveau de destins, tous les personnages étant intimement liés les uns aux autres, les situations intrinséquement nouées : chaque acte a ou aura un impact, son impact, a ou a eu une raison d'être. En quelque sorte, une psychogénéalogie indienne, terrible et émouvante, proche, à mon sens, du roman initiatique, même si la forme en diffère quelque peu. Remarquablement écrit, concentré, dense, d'une linéarité exemplaire et surprenante ( cf. le 1er chapitre, déconcertant), je pense que c'est le plus abouti des romans que j'ai pu lire de Louise Erdrich : "La chorale des maîtres-bouchers", "Dernier rapport sur les miracles à Little No Horse", déjà distingués par des critiques - , gagnant en concision et en maîtrise. Réflexion sur les actes et leur retentissement, comment les transcender, enrobé de musique chère à Louise Erdrich, pour qui c'est "le seul moyen de nous consoler de nos chagrins", histoire de vie(s) reconstituée(s) et déroulée(s) sous nos yeux, par touches successives, peinture d'un et de mondes mystérieux, pourtant si proches de notre humanité, ces voix-là nous envahissent et nous portent, par leurs voies souterraines et si évidentes. Dans tous les cas, un roman d'initiation à la culture indienne, ses traditions et ses mythes, au sein du monde contemporain.


Laurence

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